Vendredi 16 février 2024 – Signer or not signer
Avant de replonger dans mes mots pour et les mots de Chloé Mugler, revenir sur ce questionnement qui a presque sa réponse (je crois) :
Est-ce que je “signe” mes Portraits sonores ?
Avant que la question ne me percute, il y a 4-5 jours, je n’avais même pas effleuré la possibilité qu’un Portrait sonore puisse officiellement m’identifier.
Quand j’écris une biographie d’artiste, mon nom n’apparaît nulle part.
Quand je traduis un texte, je suis invisible (si je traduisais des livres, ce serait évidemment différent).
Dans mes travaux récents avec La Fantaisie Vagabonde, on sent, on perçoit, on entend, on capte, on effleure ma sensibilité, mon univers, ma patte, mais ça s’arrête là.
Sauf que je tourne autour de l’idée, depuis des jours (des semaines ?), que les Portraits sonores sont des œuvres.
Qui ne signe pas son œuvre ? Personne.
Sauf que signer une aquarelle, une huile ou une photo, c’est facile. Ou du moins : il suffit d’un crayon ou d’un pinceau.
Mais une œuvre sonore, on fait comment ?
Si je choisis l’option 1, baptisée “La Discretos”, je signe les Portraits dans les crédits du fichier sonore .wav (autant dire que personne ne verra mon nom).
L’option 2, dite “L’Écrasante”, consisterait à m’annoncer à l’oral dès le début du Portrait. Et là, non, vraiment, c’est pas possible.
L’option 3, celle que je vais creuser pour voir comment la concrétiser, s’appelle “La Délicatesse” ; elle assume son rôle sans se la raconter et s’annonce en fin de Portrait, comme dans le générique de fin d’un film. Mais sans l’image, je fais comment ?
À suivre, donc.
Mais alors après, je “signe” quoi ? Qui ?
Marie Girardin Lépine ou La Fantaisie Vagabonde ?
Je n’avais aucune foutue idée du nombre de questionnements qui découleraient de cette mise en action.
***
Maintenant, et malgré le chaos émotionnel dont je peine à m’extirper aujourd’hui, je replonge dans mes mots pour et les mots de Chloé Mugler.
Parce que je sais que, parfois, quand je suis triste et épuisée, je peux faire du joli, voire… du beau.
Il est 14h25.
Je tente avec le dernier album de Beirut en fond sonore. Histoire de me mettre dans l’ambiance.
See you on the other side.
***
17h.
Je clôture 2h30 de réécoute de l’interview de Chloé et de découpage des fragments que j’aimerais réutiliser. En tout cas, c’est une première sélection (il y en a encore trop).
J’ai mal dans la nuque et derrière les oreilles (cette saleté de casque qui appuie sur mes branches de lunettes qui, elles-mêmes, appuient sur les rochers).
C’était intense, prenant.
En réécoutant tout en x1, vitesse normale, donc, je me suis dit que la première écoute en accéléré était une mauvaise idée et qu’elle ne m’avait probablement pas servi à grand-chose. Je perdais la voix de Chloé, ses intonations, son phrasé, ce qui fait ce qu’elle est, ce qui transmet sa sensibilité.
Et aussi, je me suis dit que je n’avais pas été bonne dans la chronologie de mes questions.
Je crois (je suis sûre, en fait) d’avoir fait beaucoup mieux avec Cécile Rousseau.
J’ai par exemple mis Chloé dans l’embarras, et dès le début en plus, avec une question existentielle très abstraite. 🤨
J’ai fait le mouvement inverse lundi, avec Cécile, justement parce que je présumais que ce serait mieux de s’ancrer dans du concret au démarrage. Et ça a bien marché, je crois (je confirmerai, ou pas, quand j’écouterai l’enregistrement de son interview !).
Moment de vertige quand j’ai démarré mon après-midi de boulot sur le Portrait de Chloé :
– Par quoi je commence ?
– Je reprends mes notes manuscrites ?
OK. Relues. J’y ai surligné 2-3 phrases (pourquoi ? Je l’ignore ; j’ai juste senti qu’elles étaient importantes).
– J’ai noté quelques bouts de phrases sur mon autre feuille A4 (celle avec la frise chronologique qui ne me sert plus vraiment), mais ça ne me mène à rien.
– Est-ce que je relis toutes mes notes Notion avant de réécouter l’interview ?
– Non, j’ai préféré relire la v1 du script, écrite le mardi 7 février.
Sentiment d’un texte peu vibrant, plutôt scolaire et pas assez incarné. Mais j’aime bien sa structure. Et je vois bien en me relisant comme j’ai du mal à me positionner, moi. Où est ma voix ? Du boulot à faire là-dessus. Des tournures sonnent faux et désincarné.
– J’ai alors plongé les oreilles dans mon casque. En avant pour l’interview !
Et là, il est 17h, j’ai faim, il y a du soleil dehors et j’ai besoin de laisser reposer.
Donc… Pause ! Et je ne reprendrai probablement pas avant lundi.
Je me sens toujours au début d’un long chemin, mais j’ai l’impression d’avoir semé de vrais petits cailloux qui comptent, cette fois-ci.
J’ai avancé, quoi.
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Samedi 17 février – Les questions de Cécile qui ouvrent des portes
Dans un vocal sur WhatsApp hier soir, Cécile m’a posé une question qui fait écho à une observation de Sacheen, il y a quelques jours : que faire de l’interview complète, qui recèle d’une merveilleuse matière ?
Cécile voudrait pouvoir écouter l’interview en entier, pour réutiliser, ailleurs, certaines choses qu’elle m’a dites.
Ça me semble logique (je m’étais fait une réflexion du même type). Ce serait trop dommage de perdre plein d’éléments qui ne seront pas sélectionnés pour le Portrait sonore.
💡 Réfléchir à une offre complémentaire de “capsules audio bonus” (ou autre).
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Lundi 19 février – Les deux mains dans le Portrait + (encore) un nouvel outil
Reprise du Portrait sonore de Chloé, avec impatience et joie.
J’ai l’impression d’être enfin entrée dans la phase déterminée, où j’ai envie de croquer le projet, de l’habiter entièrement.
Je n’y viens plus à tâtons, j’ouvre la porte en grand et je m’exclame fièrement : “BONJOUR ! C’est maintenant qu’on reprend !”
Belle énergie du lundi ; c’est parti.
Tout de suite, épine dans mon pied : le fichier Word sur lequel j’ai rédigé la v1 du script m’embête. Comment faire de ce fichier un outil vraiment à mon service ?
J’ai isolé 18 extraits audio dans l’interview de Chloé ; j’ai noté ce qu’elle y dit et numéroté chaque fragment.
Sauf que ça se retrouve à la suite, sur mon fichier Word et que ça ne m’aide pas à naviguer.
Je copie-colle le tout sur un autre document pour pouvoir ouvrir deux fenêtres : mon script à gauche, la transcription des extraits audio à droite.
Et puis… et puis je me souviens de la newsletter d’Amélie hier soir, qui parlait de son outil chouchou d’autrice (dont elle m’avait déjà parlé, mais que j’avais oublié) : Scrivener.
Ni une ni deux ; confiance aveugle et certitude de tenir mon nouvel allié, j’achète une licence Scrivener et télécharge ce nouvel outil.
Les Portraits sonores sont-ils l’occasion de n’utiliser que de nouveaux outils. I think so! 🤗
Me revoilà dans Scrivener, avec une utilisation des plus basiques pour l’instant.
Texte de mon script à gauche ; transcription des extraits audio à droite.
Ça n’a pas l’air d’avoir beaucoup changé les choses par rapport à Word, mais je sais que si (pour la suite, en tout cas).
Bref, je me replonge dans les extraits audio.
Réécoute des 18 fragments et classement par type : des sujets reviennent à des moments différents.
Code couleur pour m’y retrouver.
Et puis, je vois quels extraits je peux intercaler dans mon script ; comment articuler l’ensemble.
Assez vite, j’obtiens quelque chose d’assez chouette. En tout cas, a priori. Il faudra tout écouter pour vérifier si ça se tient vraiment bien.
Retravail de mon script ; je soigne mes transitions, maintenant que j’ai les extraits intercalés.
Je lis mon script à haute voix, réécoute quelques extraits de l’interview de Chloé.
Un peu de couleur en plus…
Ça commence vraiment à ressembler à quelque chose ! 😊
Petit tour sur Artlist pour écouter quelques titres dans l’univers musical que Chloé aime.
Puis, j’explore les Sound Effects à la recherche de “bruits d’art”.
Je m’éloigne un peu du sujet, me retrouve dans la catégorie des bruits de pas sur le sol, avec chaussures, pieds nus, sur du sable, un plancher en bois.
Ça nourrit mes inspirations.
Jusqu’au fou rire, quand je tombe sur un effet sonore de pas sur le sol dans une ambiance de film d’horreur.
Je me marre en me disant que je pourrais créer une 2nde version du Portrait sonore, ambiance “nous n’avons pas retenu cette proposition (mais on s’est bien marré) !”.
J’adore l’idée que les sons et musiques que je vais ajouter vont jouer un très grand rôle dans le Portrait final.
J’ai si hâte.
Amélie, toujours elle 💖, m’a proposé tout à l’heure de me faire un tour du propriétaire.
J’accepte avec joie qu’elle m’offre une visite guidée de Scrivener.
Sur Zoom, partage d’écran, et voilà qu’elle me guide à travers les multiples options et affichages de ce formidable outil dédié aux “writers of all kinds” (les écrivant·es de tout poil).
Voilà qui va tellement m’aider pour organiser la créa pure des Portraits sonores !
Notion : pour l’organisation du projet Portrait.
Scrivener : pour l’organisation de la création Portrait.
Reaper : pour la création sonore de l’objet Portrait.
C’est subtil, mais il est maintenant évident que je devais en passer par là.
J’ai enfin l’impression de travailler avec des outils à la hauteur de mon sujet.
Je dois arrêter pour aujourd’hui, mais j’ai déjà tellement hâte de m’y remettre !
Et notamment de passer à l’enregistrement de ma voix.
Tellement cool, ce sentiment !
***
Ce soir, tard, Chloé m’envoie des vocaux sur WhatsApp, après lecture du présent Journal de bord.
Ses observations nourrissent directement ma création, c’est formidable !
En quelques mots, elle me donne la permission sans le savoir à poser sur son travail des mots que je ne m’étais pas encore autorisée.
Je les note sur un bout de papier que je pose sur ma table de chevet.
Je souris aussi de constater comme la question que je lui ai posée dans la matinée la fait réfléchir. Je l’ai interrogée à propos d’un élément de son processus créatif qu’elle ne semblait pas vouloir expliquer. Je lui ai demandé une précision, et voilà que ça génère une réflexion plus profonde chez elle.
Décidément, quelle richesse, la création de ce Portrait !
Je suis heureuse d’entendre dans ses mots qu’elle a bien compris que le Portrait sonore n’était pas une prestation de services.
Heureuse, mais empêtrée aussi. Je ne suis pas en paix du tout avec ce sujet.
Qu’est-ce que je cherche en voulant être si visible ?
Me donner la place que je ne prends pas par ailleurs, dans les écrits personnels que je… n’écris pas vraiment ?
Une réelle envie de créer un objet hybride à deux voix, pour enrichir réellement la démarche et le produit fini ?
Je crois que c’est la seconde réponse, mais je sens bien un inconfort profond.
En vrai de vrai, si je suis honnête (et que j’oublie un instant que ce Journal est lu), je sens que ce sont les deux réponses.
Ça ferait un parfait sujet à traiter avec ma psy !
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