Sous ma douche.
19 h.
Je vous l’ai dit il y a quelques jours : ma douche est magique.
Encore une fois. Pas loupé.
Boum !
L’idée de ce billet.
Alors qu’elle jaillissait devant mes yeux, j’ai pensé que la seule chose qui manquait, dans une douche, c’est un calepin ou un dictaphone waterproof.
C’est tellement fulgurant, les idées…
Ça s’attrape au vol.
Ou ça s’oublie.
Aussi sec (ou mouillé).
Je referme cette introduction.
Alors voici :
Il y a quelques années, j’ai traversé une crise.
Bon, je l’écris comme ça, et ça sonne très sensationnel, mon affaire.
Mais en vrai, j’ai bien traversé une crise.
Une “crise identitaire professionnelle”.
Dans mon métier, que j’exerce en freelance, j’entends depuis toujours qu’il faut absolument se différencier de ses concurrents.
Qu’il faut définir ce qui fait de nous le professionnel parfait pour un client potentiel.
Qu’il faut savoir vendre ce service, cette spécialisation, cette compétence, cette combinaison de langues, cet etc. qu’on a. Et les autres, pas.
Pendant plusieurs années, j’ai tourné autour de cette question.
Insoluble.
Retourné.
Insoluble.
Tellement tourné que j’en ai eu le tournis.
Insoluble.
Bon, si je veux être parfaitement honnête, je dirais que ce questionnement de fond ne m’a pas empêchée de dormir, d’avoir des clients, de gagner ma vie et de travailler sur de chouettes projets.
C’est vrai.
Sauf que.
Jusqu’au jour où.
Sauf que ça n’a pas duré.
Jusqu’au jour où j’ai compris que je devais répondre à cette question.
Non pas qu’on me l’imposât.
Non pas que ce fût objectivement nécessaire.
Non pas parce que je suis polie et que je réponds toujours aux questions qu’on me pose (et que je dis merci).
À bien y réfléchir, je crois que j’ai compris l’impératif de la question quand j’ai commencé à entrevoir la réponse.
Ça vous arrive, à vous ?
Quand quelque chose s’éclaire petit à petit, de découvrir subitement l’importance de la question initiale ?
Eh bien c’est ce qui s’est passé.
J’ai trouvé une solution.
Que voici.
J’ai plié des grues.
En origami.
Vraiment.
Concrètement.
Dans des carrés de papier de 15×15 cm.
Je rembobine :
À force de lectures, de pistes explorées, d’introspection et de discussions longues et passionnées, j’ai découvert que pour me distinguer, j’avais envie de montrer à mes clients potentiels un peu plus qui je suis.
Quitter l’uniforme de la traductrice+relectrice qui propose tels services, dans telles langues, tels jours, avec tels outils, dans tels domaines.
Pour montrer celle que je suis, quand je ne suis pas à mon bureau.
J’ai alors exploré tout ce qui fait de moi, moi (pardon my syntax!).
Et une chose est apparue.
Les grues.
Celle qui est tatouée sur mon poignet droit.
Et celles que je plie depuis des années.
Par goût, par défi.
Parce que je suis impatiente et emportée (justement pour ça).
Parce que j’adore le papier.
Et parce que ça me détend, de le plier.
Je me suis mise à plier des grues dans des feuilles rose rubis, du même rose que celui de mon site Web.
Au préalable, j’y ai imprimé mon logo, mes coordonnées et une petite formule mi-mystérieuse mi-engageante.
À l’attention de professionnels avec lesquels j’avais envie de travailler.
J’ai passé des heures à bien caler les textes pour qu’ils apparaissent pile poil là où il faut, une fois la grue pliée (i.e. sur les ailes et en dessous).
Travail de fourmi. Au service d’un oiseau migrateur.
Et alors, j’ai plié mes grues.
Puis, je les ai chargées d’une bonne dose d’enthousiasme et d’optimisme.
Je les ai glissées dans des enveloppes.
Et enfin, je les ai envoyées.
Jubilation passagère.
Jubilation intense.
Je venais de me singulariser dans ma manière de communiquer.
Je venais de dévoiler un fragment de mon identité à des prospects.
Je venais de prendre un plaisir fou à le faire.
Je venais de trouver une nouvelle synergie entre moi, ici et moi, là.
Et, sans le savoir, je venais aussi (surtout ?) d’écrire la première page
de La Fantaisie Vagabonde.
Quel retour en arrière ! Et puis, maintenant, la boucle est bouclée… grâce au miracle de milliers de gouttelettes d’eau . De toutes façons, l’eau, en général, non seulement ça lave mais ça éclaircit les idées. Ceci expliquant sans doute cela ! La grue, cousine du héron ? Ces derniers se plaisent dans le marais mais s’envolent à notre approche 😕. Mais qu’ont-ils donc dans la tête, eux ? Encore bravo.