… Mise en pratique avec Mai Tabakian
Si j’étais joueuse, je répondrais “comme vous voulez, pardi !”
Mais comme je suis joueuse (!), je vais m’employer à vous en dire un peu plus.
Visiter une exposition d’art, c’est toujours une chouette idée.
Qu’il s’agisse d’une grande expo internationale dans un musée fameux ou d’un événement plus confidentiel organisé dans un petit atelier (ou de tout ce qu’il y a entre les deux),
Visiter une exposition d’art, ça met les sens en ébullition, à condition qu’on accepte de se laisser bouillir un peu.
Ma dernière visite d’expo est toute récente.
C’était le week-end dernier, au Centre d’art Les 3 Cha, à Châteaugiron, près de Rennes.
Les 3 Cha, c’est un lieu d’exposition atypique : une chapelle du XIIe siècle, dont la rénovation a été achevée en 2015.
Et sa particularité, c’est que les artistes qui y exposent sont invités à créer leur(s) œuvre(s) in situ.
“Au centre d’art, l’art « met en vie », valorise l’écrin patrimonial et permet au public, à chaque exposition, de découvrir ou redécouvrir la beauté du monument sous un nouvel angle, celui du regard de l’artiste.”
Et ça, eh bien, je trouve que c’est formidable.
J’y ai vu des œuvres aussi variées que les pissenlits de Duy Anh Nhan, les insectes géants de Marc Georgeault, les sculptures d’acier de Pierre Gaucher…
Et samedi dernier, les Objets flottants de Mai Tabakian.
Pour visiter une exposition d’art, commencez par vous écouter !
C’est mon premier conseil.
Directement lié à ma propre pratique de la visite artistique :
Quand j’entre dans un lieu d’art, je laisse toujours le temps à mon corps de s’ancrer dans l’espace, à mes yeux de se fixer ou de déambuler et à mon ventre de faire le reste.
Et le reste, c’est peut-être le plus important.
C’est mon ventre qui me guide :
– vers la sortie s’il ne trouve rien pour s’alimenter
– vers une œuvre particulière ; et mon cerveau découvrira pourquoi plus tard
– dans une déambulation aléatoire et (presque) exhaustive, car il trouve du “bon art à manger” un peu partout
Quand je visite une exposition, je ne cherche jamais à comprendre.
En tout cas pas au début.
Je commence par ressentir.
Et je finis par comprendre… en lisant la documentation disponible (cartels, catalogue, etc.).
Et c’est là qu’entre en jeu mon deuxième conseil :
Quand vous visiterez une exposition d’art, offrez-vous la liberté :
- de ne rien saisir et d’aimer ça
- de ne rien capter et de détester ça
- de désapprouver ce que vous découvrez et de prendre vos jambes à votre cou
- de lire tous les supports d’explication avec avidité
- de poser un millier de questions au/à la médiateur·trice culturel·le
- de vous asseoir sur un banc et d’y rester longtemps
- de griffonner un croquis sur un calepin
- de choisir une œuvre et de négliger toutes les autres
- de prendre des dizaines de photos (là, votre libre arbitre s’arrête où commencent les interdictions du lieu)
- d’écouter les gens parler (j’adore faire ça !)
Selon moi, le plus important, quand on visite une expo, c’est de s’autoriser à ressentir.
Quelque chose.
N’importe quoi.
Et d’avoir du temps devant soi
Qu’on étirera avec délice
Ou qu’on raccourcira, faute d’y trouver de l’intérêt.
Vous pouvez aussi :
Visiter une exposition d’art avec un compagnon de déambulation
Et faire l’exercice suivant :
Découvrez l’exposition chacun·e de votre côté (comme vous le sentez ; cf. les points précédents).
Puis, quand vous êtes prêt·e·s, confrontez vos sensations, vos émotions, votre (in)compréhension de ce qui vous entoure, discutez !
Croyez-moi, l’échange qui s’installe sera forcément riche d’éclairages inattendus (les vôtres et les siens).
Évidemment, cet exercice n’est possible que si vous êtes mutuellement en confiance.
Pour visiter une exposition d’art, suivez le guide !
C’est –presque– toujours une bonne idée.
Participer à une visite guidée ou écouter le récit informel d’un·e médiateur·trice remplira quelques tiroirs de votre matière grise.
Ceux qui désirent acquérir du savoir en apprendront beaucoup.
Et ceux qui, comme moi, retiennent mieux ce qu’on leur dit que ce qu’ils lisent, dans les musées, seront rassasiés.
Un bémol, néanmoins :
D’après mon expérience des visites guidées institutionnelles, le cerveau est allègrement nourri, mais le ventre (celui du début de l’article), beaucoup moins.
N’hésitez donc pas, avant ou après la visite, à (re)faire le tour de l’exposition et d’écouter votre estomac.
Enfin,
Pour découvrir une exposition d’art, participez !
Si l’on vous y invite, n’hésitez pas : jouez, contribuez, mettez les mains à la pâte.
Sur les murs du centre d’art Les 3 Cha, Mai Tabakian a disposé ses “Blasons-codes”, en écho aux blasons qui ornaient jadis la nef de la chapelle.
On y trouve un QR code qu’il suffit de scanner avec son smartphone. À nous, ensuite, de le décoder !
Et je ne vous parle pas du jeu de l’oie géant, “Le grand chemin”, disposé au milieu de la chapelle !
Bref, quand vous visitez une exposition, sentez-vous libre de vous amuser.
Vous vous emparerez de l’exposition, lui donnerez un sens (le vôtre).
Et puis, vous incarnerez pleinement l’esprit de La Fantaisie Vagabonde. 🙂
Et en plus-bonus, vous serez fin prêt·e pour ce que je vous prépare pour 2019…
Pourvu qu’ils t’entendent ! 😊
Merci chère insatiable vagabonde pour cette belle invitation à pousser la porte de “l’expo”.
Si les “ce n’est pas pour moi”, les “ça ne m’intéresse pas”, les “j’ai mieux à faire” pouvaient te lire, ils deviendraient curieux et gourmands et, donnant carte blanche à leurs cinq sens, ils entreraient en laissant dehors leurs préjugés.
Merci pour ce commentaire qui donne des ailes ! ✨
Merci Marie pour cet article très complet qui détonne. C’est un hymne à la liberté de déambuler, d’aimer, de détester mais surtout un encouragement à ressentir et être soi. L’exposition est un voyage émotionnel à travers soi.
Ahah oui ! Exprimer ses réactions spontanées à voix haute est parfois dangereux ! Mais… et si on se donnait la liberté de s’exclamer « c’est beau ! » aussi fort que lorsqu’on n’adhère pas ?
Merci pour tes mots ! 😊
Moi aussi, dans une exposition d’art, c’est le ventre qui me guide !
La visite est rapide ou très longue, c’est selon… Selon le ressenti.
Si le ressenti est positif, je passe et repasse et m’arrête surtout, sur ce qui me touche et m’émerveille.
Si l’artiste est là, j’aime poser des questions, avoir des explications. C’est tellement important et enrichissant le contact avec le créateur.
Et si c’est “moche” (à mon avis évidemment – peut-être que je ne comprends rien), j’ai un peu trop tendance à le dire, parfois un peu trop fort ! Alors, oui, attention aux petites oreilles qui traînent !!
En tout cas Marie, tu prodigues de bons conseils et d’une façon toujours aussi exquise telle une explosion de couleurs. On se laisse emporter par les mots qui résonnent comme une symphonie. Bravo !
Dorénavant, je ne verrai plus une expo de la même façon et toujours en pensant à toi et à ta Fantaisie !